L’installation Cosmologie des mutations s’inspire de la notion de somathèque, élaborée par le philosophe Paul B. Preciado, afin de constituer une archive des corps et des étais de joie. À mille lieux des représentations normées, l’artiste propose au participant.e.s de former cette archive en prenant part à des ateliers visant la réaoppropriation de dispositifs normalement utilisés pour la surveillance-caméras de sécurité ou de passeport. Les photographies résultant de ces ateliers sont intégrées par l’artiste dans une grande mosaïque vidéo, qui permet de rassembler les contributions individuelles de chacun.e dans une image pulsante et vive, ainsi que dans une carte du ciel composée de papier recyclé, fabriqué par l’artiste en collaboration avec l’atelier retailles et activée dans un geste performatif. Cette démarche ne se veut pas seulement une forme d’inclusion, mais un réel dialogue où ce qui importe est la possibilité de tisser des liens et d’opérer des transformations.  Elle entretient un rapport fort entre le désir de s’extraire de modèles imposés de l’extérieur et d’initier une mutation collective à même les corps. Alors qu’une variété de corps, de perspectives et de réalités se trouvent dans l’ombre de la vie publique, ce processus de création a pour but de les mettre en lumière, les faire apparaître, voire les faire briller. S’attacher au collectif, c’est tisser des liens qui libèrent. Pour moi bien sûr c’est un pas collectif dans un processus de révolution interne par le soin qui apportera pas à pas par des gestes de l’intérieur et contribuera à faire valoir cette mutation et transformation de notre épistémologie contemporaine, car « récupérer l’imagination comme force de transformation politique, c’est déjà commencer à muter »[1].

[1] Paul B.Preciado, Dysphoria mundi, Grasset, 2023, p.58.